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Présentation

  • : Les machines du fantasmagore
  • : Présentation d'attractions de pré-cinéma, du XVIIe siècle à nos jours : optique, lanterne magique, image animée, théâtre, ombres chinoises, cinématographe ancien, photo en relief, 3D
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Fantasmagorie, lanterne magique, diorama... les spectacles optiques sont monnaie courante au XIXe siècle. Pourtant, rares sont les témoignages parvenus jusqu'à nous de l'activité des précurseurs du cinématographe. La recherche de documents d'époque et le dépouillement de la presse ancienne, préalable indispensable à la création des animations des Machines du Fantasmagore, vient heureusement combler nos lacunes et enrichir nos connaissances. En voici pour preuve une sélection de documents recueillis lors de nos recherches sur les spectacles de pré-cinéma à Toulouse au 19e siècle. Nous découvrirons ainsi au fil du temps :

Les attractions foraines :
. le cosmorama Rey en 1829

. le diorama du Casino des Beaux Arts en 1842

 . le diorama place Lafayette en 1844


Les spectacles de projection :
. fantasmagorie et physique amusante  (1804-1858)
. Pierre Rochette, un montreur de lanterne magique à Toulouse (1827-1853)
. fêtes caritatives et lanterne magique enfantine (1850-1880)
. les conférences illustrées (Trutat 1885-1900)

La vente d'appareils :
. opticiens, photographes : Bianchi, Patin et Lacaze (1825 - 1880)

. les objets primes : le lampascope


et en plus :
ceci vous représente... l'histoire d'une famille de montreurs d'optique ambulants par Adrien Bouvard, ancien directeur du Théâtre du Capitole de Toulouse (1883)

. zograscope et polyorama à Toulouse... dans les années soixante au musée Paul-Dupuy

 

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Le COSMORAMA du sieur REY en 1829

Un spectacle admirable pour une société choisie...

COSMORAMA ET DIOPHORAMA

"M. Rey, chevalier de la Légion d'Honneur, propriétaire du Cosmorama, a l'honneur d'inviter les habitans de cette ville, et les amis des arts, à venir jouir d'un spectacle qu'il ose dire bien fait pour piquer vivement leur curiosité. Toutes les peintures que renferme ce bel établissement, sont des oeuvres de grands maîtres, et chacune d'elles est présentée sous des dimensions de 4 à 10 pieds, et ce n'est qu'après avoir admiré les chefs-d'oeuvre qui y sont exposés, que l'on pourra s'en former une idée, et en apprécier toutes les beautés. Il suffira de dire en dernière analyse, que cet établissement est la plus heureuse imitation qui ait été faite jusqu'à ce jour.
On ne peut qu'être agréablement surpris à la vue des scènes les plus variées, qui sont comme groupées et réunies pour le plaisir des yeux : un peu d'espace a suffi au peintre et à l'opticien pour faire paraître avec leur vie, leur fraîcheur, leur magnificence, des batailles, des paysages, des monumens ; ici c'est Leipsick et la sanglante journée du 18 octobre ; là, cette Suisse à la gracieuse mémoire ; plus loin, l'aspect de Londres ou la basilique de St-Jean-de-Latran ; mais tout cela est plein de charmes, d'expression, et à peine si l'on regrette en sortant de n'avoir point vu les modèles.
Cet établissement s'honore d'avoir été visité par une foule de personnes distinguées, par l'élite des artistes et des amateurs, et même par plusieurs princes d'Europe. La présence de ces illustres personnages et les suffrages honorables qu'il en a reçus sont un titre estimable en sa faveur, et ne peuvent que lui assurer partout où il se montrera, un succès constant et mérité.
Le Cosmorama de M. Rey, est situé rue des Pénitens-Bleus, n° 9, il est visible depuis 4 heures jusqu'à 10 heures du soir.
Les personnes qui désirent voir le cosmorama en société particulière, sont priées d'en faire parvenir l'avis un instant auparavant à l'adresse suivante : M. Rey, maison Portes, rue de la Pomme, n° 54."

(Le Journal de Toulouse, 21 octobre 1829)

 

COSMORAMA ET DIOPHORAMA


"Les plus grands princes de l'Europe ont daigné visiter l'unique et incomparable Cosmorama et Diophorama de M. Rey, de Strasbourg, chevalier de la légion d'honneur. La présence de ces illustres personnages prouve naturellement le mérite de cette rare et unique exposition. Ainsi, nous n'avons pas lieu de douter que les habitans de cette ville, amis et amateurs du sublime et des beaux-arts, se rendront à cette surprenante et admirable exposition, dont les tableaux séducteurs, sous le rapport des illusions et du magique, annoncent tout le merveilleux des pinceaux de nos plus grands maîtres. L'oeil étonné et ravi y admire l'horreur des tempêtes, des combats, des incendies et des ruines majestueuses de Troie et de Rome. Il y contemple la majesté des cieux et toutes les beautés terrestres ; il est frappé d'étonnement et d'admiration à l'apparition des plus belles cités de l'univers dont la perspective offre un lointain de plusieurs lieues ; bref, il est ravi à la vue des chefs-d'oeuvre de l'art et de la nature. Nous engageons MM. les habitans de cette ville à visiter cette majestueuse exposition, dont le salon, situé rue des Pénitens Bleus, à côté de l'Athénée, en face de la Manutention, est ouvert chaque jour de la semaine, de 4 heures de l'après-midi jusqu'à 10 heures du soir. Les changements de vue auront lieu dimanche 1er novembre.
N.B. Tous les objets exposés paraîtront de grandeur naturelle, et les lointains sont ménagés de manière à rendre l'illusion complète."

(Le Journal de Toulouse, 30 octobre 1829)

 
Le programme...

 

EXPOSITION EXTRAORDINAIRE
 

"Le Cosmorama du sieur Rey, est situé rue des Pénitens-Bleus, en face de la Manutention, à côté de l'Athénée.
Ve Exposition
La bataille de Leipsick en trois points de vue (à la demande générale) ;
4. Intérieur de la superbe église de St-Jean-de-Latran (Diorama).
5. Amsterdam, l'hôtel-de-ville, le canal et le marché aux fleurs ;
6. Deuxième vue de la jolie ville de Giebichenstein (Prusse) ;
7. Hambourg, le port et les promenades (Saxe) ;
8. La mort du prince Poniatowski, dans l'Elster ;
9. La grande chute d'eau de Prolleten (Suède).
Le Cosmorama est ouvert depuis une heure après-midi, jusqu'à dix heures du soir.
Le prix d'entrée est d'un franc. On pourra se procurer d'avance des billets de famille maison Portes, rue de la Pomme, n° 54."

(Le Journal de Toulouse, 23 novembre 1829)

 

Le 18 décembre, pour relancer la fréquentation après deux mois d’exploitation, une baisse de prix est annoncée : d’un franc, l’entrée passe à 75 centimes et les cartes de famille à 60 c. Le nouveau programme –qui durera jusqu’au début janvier 1830- est ainsi composé :

4. route de Genève au Simplon. 5. Branbach et le château de Marcusbourg sur le Rhin. 6. Versoix, lac de Geneve et le beau château d’Alamant. 7. Les ruines du château de Habsbourg (Suisse). 8. St-Coard, ancien couvent, dans le duché du Bas-Rhin. 9. La jolie ville de Copenhague et ses belles promenades.

 

Le 10 janvier 1830, dernier changement de vues avant la clôture définitive annoncée comme imminente :

4. Berne. 5. Château St.-Ange à Rome. 6. Le palais du Doge à Venise. 7. Le superbe Temple St-Nicolas à Leipskck. 8. Oberwesell (Sur-le-Rhin). 9. Détroit de Gibraltar.

 

Si les programmes des expositions se succèdent, le nombre de tableaux n’est pas infini. Ainsi, le palais du Doge, le détroit de Gibraltar et le temple St-Nicolas ont-ils été déjà montrés lors de la quatrième exposition du 15 novembre, en compagnie du «Château de Chilon sur le lac de Genève», de la «chute du Rhin à Schaffaussen au clair de lune», et l’"étonnante et superbe vallée d’Elbe».

 

A côté des monuments et sites pittoresques, les grands faits d'histoire viennent corser le spectacle. Ainsi, les tableaux de "la bataille de Dresde, où l'on voit emporter le général Moreau par les Russes sur des lances" et "la frégate Freya portant le prince Criastian par un grand orage" pimentent-ils la 6e exposition. Mais c'est un combat encore plus sanglant qui restera dans la mémoire de chaque visiteur, illustré en trois points de vue à la demande générale.

 

La bataille de Leipsick est en effet présentée en permanence. Celle qui restera comme la "bataille des Nations" fut la plus grande confrontation des guerres napoléoniennes et la pire défaite subie par l'Empereur. Elle opposa, en octobre 1813, la Grande armée aux 330 000 hommes de la coalition prusso-austro-russo-suédoise. Durant trois jour les combats firent rage, lorsque les alliés Saxons et leur artillerie se retournèrent sans prévenir contre les troupes de Napoléon. Les pertes furent énormes, environ 100 000 morts ou blessés des deux côtés.

Seize ans après les faits, le regard du chroniqueur se teinte de romantisme : «rien n’est intéressant comme l’esquisse de la bataille de Leipsick: les belles y trouveront des émotions, les paysagistes des points de vue et les braves des souvenirs». (Journal de Toulouse, 26 octobre 1829)

 

«Acheminez-vous paisiblement, entre six et sept heures, vers la rue des Pénitens-Bleus : vous y trouverez tout à la fois, plaisir, surprise et tranquillité. D’abord, à la première moitié de votre joyeux pèlerinage, le Cosmorama et son enseigne illuminée s’offriront comme un guide pour la route, comme un délassement pour l’ennui. Des lacs, des flottes, des batailles, les merveilles de l’Europe réunies sous vos yeux, répondront aux premiers désirs d’une curiosité avide et capricieuse; et quand le tour du monde sera fini, l’archet de l’Athénée réveillera votre dédaigneuse indifférence et sollicitera vos derniers loisirs. (Journal de Toulouse, 18 décembre 1829)

 

Car le public est bien convié à un spectacle, habilement installé en plein centre ville à proximité du couloir d'entrée d'un théatre populaire où se produisent attractions, concerts, cirques et prestidigitateurs : l’Athénée, plus tard reconverti en cinéma (l’American Cosmograph, devenu le Rio puis l’Utopia avant de retrouver en 2016 son nom d'origine).

L’immeuble en brique où était exhibé le Cosmorama existe toujours au n° 9 de l’actuelle rue du Lieutenant-Colonel Pelissier, de même que l’entrée de l’Athénée au n° 7, devenue la sortie de secours du cinéma aujourd’hui ouvert sur la rue Montardy.

  

rue-des-penitens-bleus.jpg

 

L’origine du Cosmorama...

  

Le Cosmorama (du grec Cosmos, monde, et orama, la vision) est initialement un spectacle parisien ouvert en 1808 par un réfugié piémontais, l'abbé Gazzera, au Palais Royal. La collection était composée de tableaux à la gouache et à l'aquarelle dont les dimensions, d'abord de 2 pieds et demi de hauteur sur 3 et demi de long, furent presque doublées quinze ans plus tard. Le nombre de vues, dont le programme changeait tous les mois, s'éleva progressivement de 260 à près de 800.
Vingt-quatre verres d'optique, disposés autour d'un vaste salon, montraient chacun trois tableaux ; le grossissement dû aux lentilles, combiné avec des effets d'éclairage, donnait l'illusion de la réalité aux paysages pittoresques et monuments remarquables du monde entier dont la contemplation constituait le spectacle.


Lors de la construction de la nouvelle galerie vitrée du Palais Royal en 1828, le Cosmorama fut transféré passage Vivienne. Seuls les meilleurs tableaux furent conservés pour y être présentés. Gazzera en donna à ses amis, les autres furent dispersés entre différentes villes. Le programme présenté par M. Rey à Toulouse en cette fin d'année 1829 serait-il issu de cette dispersion ? La concordance des dates conforte cette hypothèse. Tout comme le mode d'exposition partielle de neuf vues différentes pratiqué à Paris comme à Toulouse.


Passé de mode, le Cosmorama termina sa carrière parisienne en 1832. Héritier direct de la boite d'optique dont il exploite les thèmes et la technique, contemporain des panoramas,  il est considéré comme l'un des précurseurs du diorama de Daguerre et Bouton.


(sources : Dictionnaire des inventions 1827 - Encyclopédie du 19e siècle 1836-1853 - Annonce du Journal de Paris du 19 février 1818).

 

Cliquer ici pour lire la page suivante : Le Diorama du Casino des Beaux Arts en 1842

 

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